Le bien, le mal, le bonheur 1

Ça me préoccupe depuis des semaines : distinguer le bien du mal. Alors que je suis convaincue de le savoir et que, sur cette base, je juge tout autour de moi, je vois bien qu’il a là quelque chose de malsain. La preuve : plus je juge, plus je suis malheureuse; plus je suis malheureuse, plus je juge.

Comme par hasard, c’est pile ce qu’on peut lire dans la Genèse : c’est en mangeant un fruit de l’arbre de la connaissance qu’Adam et Ève, devenant des Dieux, peuvent soudainement distinguer le bien du mal, ont honte de leur nudité et se cachent dans les buissons pour échapper au regard de Dieu (haha, comme l’humain peut être absurde parfois!) avant d’être chassés de l’Éden.

Oui, mais tout de même : il y a bien des actes qui sont mauvais et d’autres qui sont bons, non? Et on devrait être capable de les distinguer, non? Sûrement. Mais ce n’est pas à nous de le dire. Dans son message sur le bien et le mal, le pasteur Jean-René se demande avec son humour habituel : est-ce que j’ai le droit? Est-ce que j’ai le droit de porter un t-shirt d’AC/DC en prêchant? De prendre de la drogue en venant à l’église? De faire le sexe avant de me marier, de tricher pendant un examen? Oui, oui, oui et oui, répond le pasteur. En somme : on se mêle de ce qui ne nous regarde pas en qualifiant de « mal » certains comportements.

« On s’est mêlé de beaucoup de choses au nom de la religion, et on s’en mêle encore, dit Jean-René. C’est la plus grande distraction du vrai message de Dieu et un des plus grands voleurs de la grâce. »

Il se donne en exemple. Lorsqu’il a commencé à fréquenter La Chapelle, il prenait de la drogue et en vendait. Un jour, sa mère lui demande s’il consomme encore, il répond honnêtement, par la positive et… elle ne répond rien. Elle ne le juge pas et ne lui conseille pas d’arrêter, même si elle était probablement triste ou inquiète de la situation. « C’est le plus cadeau qu’elle aurait pu me faire, dit Jean-René : faire confiance qu’il valait mieux laisser le Saint-Esprit me guider, plutôt que d’essayer de faire mieux que lui. »

C’est beau, mais dur à mettre en pratique… Il faut que je me rappelle, bêtement, que j’ignore toujours pourquoi une personne agit comme ceci ou comme cela, même si j’ai quelques hypothèses – genre, c’est une crisse de conne 😉 😉 Plus sérieusement, si quelqu’un me juge pour mon comportement, je vais l’envoyer promener; pourquoi un ou une autre réagiront-ils différemment si je les juge?

Dans son message, Jean-René donne aussi l’exemple de femme adultère. Les hommes de la loi tendent un piège à Jésus, en lançant devant lui une femme coupable d’adultère, prise sur le fait, qu’ils lui demandent de la condamner. Au contraire, Jésus s’assoit sur le sol, à côté de la femme, et dessine dans la poussière. Au final, les hommes de loi quittent un à un, et Jésus dit à la femme qu’il ne la condamne pas, tout en l’enjoignant à ne plus pêcher.

Bon, on me répondra qu’en 2023, c’est facile de pardonner l’adultère! Mais c’est une métaphore pour tous les comportements mal vus en société. Aujourd’hui, il faut donc aussi pardonner la destruction de l’environnement, l’absence de sens civique, les propos racistes, la consommation ostentatoire… Ouf. Je m’énerve chaque fois que je vois un VUS, le chemin va être long.

Ça ne veut pas dire de tout laisser passer en haussant les épaules avec indifférence. Ça veut dire créer un lien avec la personne « fautive » pour comprendre son comportement et lui offrir de la compassion et/ou de l’aide plutôt qu’un jugement sans appel. Quitte à lui dire : je t’aime, mais ton comportement me blesse trop pour que j’accepte de passer du temps avec toi. (Je n’ai pas dit que ce serait facile!!)

Être meilleure que – II

Allez! Je vais faire sortir le méchant qui nuit à mes relations ET à mon bonheur personnel. En étant sobre, cette fois.

Il y a souvent des bribes de réflexion qui me viennent à l’esprit lorsque je suis en train de faire autre chose… Je vais essayer d’en retranscrire quelques-unes ici en espérant y voir plus clair.

Meilleure que, c’est lié à mon esprit « champ gauche ». Souvent, pour ne pas dire très souvent, j’appartiens à une minorité. Cela peut toucher à des choses très banales, comme mes goûts musicaux ou mes activités de loisir, ou à des choses plus sérieuses, comme mes opinions politiques, mes valeurs ou mon orientation sexuelle. Dans tous les cas, je suis souvent minoritaire. Cela contribue à mon sentiment de supériorité, car, contrairement à la majorité, je suis prête à suspendre mon sentiment spontané d’horreur ou de « gros bon sens » pour examiner la validité intrinsèque d’une idée. Par exemple, l’idée ajuster l’offre de biens et de services à la main d’oeuvre disponible, plutôt que l’inverse; mettre sur un pied d’égalité industriel et juridique les animaux de ferme et les animaux de compagnie; aller méditer 10 jours dans le silence, sans livre ni crayon 😉

Mais je ne dois pas répondre au rejet que j’ai souvent ressenti par du rejet… Sinon, où cela mène-t-il? Autrement dit, l’originalité de ma pensée ne doit pas se muer en mépris pour les autres. Comme je m’en rappelle parfois, ce n’est de leur faute si je suis plus intelligente qu’eux haha! Ou tout au moins, si je suis plus capable de voir loin et de creuser une idée…

Et je me rends compte, en travaillant à mon nouvel emploi dans une PME, que le copropriétaire de l’entreprise a des qualités très différentes des miennes, mais que j’admire énormément : sa capacité à écouter, à faire confiance, à accepter l’imperfection et le temporaire, à ne pas se fâcher et à ne pas se tromper dans ses calculs! Bref, même si m’imagine « meilleure que », il y a bien des choses que je ne sais pas ou que je n’arrive pas à faire aussi bien que les autres.

Un autre élément de mon sentiment de supériorité tient d’ailleurs à ma difficulté à accepter la différence. Prenons ma mère, par exemple, qui s’inquiète pour un rien et qui me raconte les événements de sa vie comme le ferait un disque : avec des phrases toutes faites, répétées déjà 10 à d’autres amis(-es) ou parents proches. Sans compter les moult détails du style, « Je lui ai dit ‘Bonjour’, il m’a répondu ‘Bonjour' »…

Mais, face à son inquiétude ou au côté assommant ou artificiel de ses histoires, la colère ou l’impatience n’est pas une bonne réponse. Oui, ma mère a une façon d’être différente de la mienne et elle a le droit. En réagissant avec colère ou impatience, non seulement je lui manque de respect, mais je me coupe probablement d’une relation plus profonde avec elle.

Tout cela me ramène à cette réalité que, même si je suis souvent convaincue d’être « meilleure que », j’ai généralement du mal à me montrer fièrement telle que je suis et à prendre des risques avec les autres, ce qui m’entraîne beaucoup d’anxiété et de négativité… Cette phrase résonne, je sens sa vérité dans mon épaule.

En étant plus ouverte aux positions, aux réflexions et aux réalités des autres, et en démontrant plus de compassion et de douceur à leur égard, je me sentirais certainement plus à l’aise d’exposer mes propres positions. Comme disait je ne sais plus qui, ce sont les éléments que l’on nourrit qui vont croître…

Enfin, c’est fou! En cherchant une image pour illustrer ce texte, je suis tombée sur les notes d’un révérend. Toute est dans toute! Il y a aussi cette image qui me tente, mais c’est justement de cette attitude que je dois me débarrasser ¯_(ツ)_/¯