Ces dernières semaines, j’ai avancé dans ma connaissance de moi. Plus précisément, j’ai progressé dans ma compréhension de la grande Anick, que je voyais comme une espèce d’ombre inquiétante. En fait, cette ombre inquiétante est moins une version agrandie de moi-même qu’un gros monstre intérieur, un genre de gros yéti très bougon.
La lumière a commencé à se faire dans mon esprit il y a environ deux semaines, quand j’ai décidé de travailler plus sérieusement à me débarrasser de mes préjugés racistes.
Je sais, je sais que le racisme n’a pas sa raison d’être, qu’il est injuste et moralement inacceptable. Je sais aussi qu’il n’a aucune assise scientifique. En fait, j’ai découvert en réalisant quelques recherches pour ce post que classer les humains selon leur race « est aussi absurde que de vouloir classer la forme des icebergs en fonction de leur partie émergée » puisque la science n’a pas trouvé de gènes spécifiques à tous les membres d’une race. J’ai aussi appris grâce au Centre national de la recherche scientifique que le concept même de race est restée inexistant jusqu’au XIXe siècle. Dans la vision catholique dominante de l’époque, nous étions tous des descendants d’Adam et Ève, ce qui excluait toute idée de supériorité ou d’infériorité raciale.
Mais, même si je sais tout cela, cela n’empêche pas, quand je vois une personne racisée, de me dire « Ah. Un-e Noir-e. » ou « Ah. Un-e asiatique. » Je ne remarque pas d’abord leur coiffure, leur attitude, leur « rôle social » (par exemple, étudiant) ou leur habillement, mais leur couleur. Toujours. Toujours. Le problème, c’est que ce n’est pas le cas quand je croise un Blanc. Je ne me dis pas « Ah. Un-e Blanc-he », mais « Ah, un étudiant » « Beau manteau », « Quel air de bœuf », etc. Cette différence me gêne, et j’ai décidé d’agir pour que ça change.
Petite parenthèse : je surprend bien des amis quand je leur parle de mes préjugés racistes. La fille progressive que je suis est évidemment contre, mais il n’empêche qu’au-delà du principe, je connais très peu de choses sur les personnes racisées, incluant leurs réalités, leur histoire, leur culture, etc. Et que, dans les faits, je ne pose aucune action concrète pour avancer la cause des personnes racisées. Cette vidéo de la professeure et auteure Robin DiAngelo explique très bien comment le racisme blanc n’a pas besoin d’être intentionnel pour exister. Fin de la parenthèse.
Pour l’instant, donc, côté action, j’ai emprunté à la bibliothèque Le racisme, de Albert Memmi (qui m’a rappelé entre autres que les « vrais » racistes refusent habituellement cette étiquette, ce qui doit vouloir dire que je fais quelque chose de bien hihihi), ainsi que plusieurs romans d’auteurs québécois d’origine haïtienne. Alors que je lis beaucoup, je n’avais jamais lu d’auteur noir, ce qui n’est pas un hasard selon moi.
Résultat : j’apprends des choses et je me familiarise avec une culture que je côtoie sans la connaître. Et, de manière très inattendue, cela me met de bonne humeur et me donne de l’énergie!! On dirait que confronter mes préjugés racistes m’a libérée d’une grosse colère et a développé ma compassion envers moi-même et les autres. Parce que, en fin de compte, qu’est-ce que le racisme sinon de la colère envers un autre et un manque de compassion et d’empathie pour lui? Et, j’ai l’impression que cette vision plus claire de moi-même et de la réalité m’a permis de mieux voir et de mieux ressentir mon yéti bougon intérieur…
Ce monstre est difficile à décrire pour l’instant. Je sais qu’il est soupe au lait et qu’il se fâche pour un rien. Qu’il a aussi un ego surdimensionné et qu’il prend les choses de façon très personnelle alors qu’elles n’ont le plus souvent rien à voir avec lui…
Cela dit, je ne veux pas m’étendre dans une description sans fin et perdre de vue l’essentiel : mon gros yéti, dans le fond, n’a besoin que de compassion et d’amour. S’il est aussi bougon, c’est qu’il se sent incompris et triste… Pauvre petit yéti!!
Un dernier petit mot : embrasser mon yéti intérieur et faire preuve de compassion envers lui me donne de l’énergie (comme quand je m’intéresse aux réalités des personnes racisées), ce qui me me confirme que je suis sur la bonne voie. À suivre!