Jugement, pardon et grosse boule au cœur

Ce thème me traîne dans la tête depuis au moins deux mois. C’est notamment à cause de lui (ou grâce à, c’est selon 😉 ) que j’ai décidé de revenir sur ce blogue. Ma réflexion n’est pas encore terminée (mais l’est-elle jamais) et c’est assez gênant d’exposer de tout cela, néanmoins j’espère que la magie du blogue et de l’écriture agiront une fois de plus et m’aideront à approfondir ces idées.

Le jugement, donc. Je juge tellement les autres, ça en devient ridicule. Les conducteurs, surtout, qui dépassent les limites de vitesse permise… Ils sont nombreux, c’est facile de penser seulement à cela dès que je mets le pied dehors. Cela dit, je juge aussi durement tous ceux qui semblent avoir laissé leur sens civique à la maison : ils oublient de se pousser quand d’autres personnes approchent, ne disent pas à leurs enfants « Laisse passer la madame », abandonnent leurs déchets sur la voie publique, écoutent leur musique à plein volume dans la rue… J’ai l’impression d’avoir abordé cette question ici plusieurs fois, mais on dirait que ça ne s’arrange pas 😦 Je juge aussi durement (presque) tout ce que je vois sur Facebook. Je passe beaucoup de temps sur ce réseau social (bonjour la procrastination), mais rien ne me plait, ou presque. Je trouve les publications souvent connes, inintéressantes, ennuyantes. Charmant!

C’est cette scène qui m’amusait et que, pour un peu, je ne prenais pas en photo! #jardins #findesaison

Et puis, cette semaine, j’ai compris qu’une bonne part de mon anxiété provient de ma peur que les autres me jugent – heureusement, l’ironie de la chose de m’a pas échappée… J’ai aussi remarqué que, quand je fais disparaître dans mon esprit jusqu’à la possibilité que les autres me jugent, je me sens mieux et je réalise plus joyeusement ma tâche. En somme, j’ai eu une preuve incontestable que le jugement des autres, c’est de la marde. La Chapelle me l’a confirmé, avec la prédication de Jean-Philippe sur l’amertume. « La question n’est pas de savoir si vous allez être offensé, mais ce que vous ferez avec cette offense. » Comme chacun de nous, Jean-Philippe est offensé par toutes sortes de comportements : quelqu’un qui ne lui tient pas la porte, un conducteur qui le coupe sur la route, sa blonde qui lui suggère subtilement de porter d’autres vêtements… Nous avons tous nos « boutons », c’est-à-dire des comportements ou des questions qui réveillent le yéti en nous.

Alors, que faire? Pardonner, bien sûr, dit Jean-Philippe. Quoi d’autre? Rester avec son ressentiment, jusqu’à imaginer que nous sommes les seuls à avoir raison, à comprendre, à pouvoir distinguer le vrai du faux? Assez solitaire et ennuyant, oui…

Hier, j’avais les paroles de Jean-Philippe en tête alors que je faisais mes courses. Je me sentie offensée par ce client qui laissait son chariot en plein milieu de l’allée mais, plutôt que de soupirer bruyamment ou de râler intérieurement contre lui, j’ai simplement doucement déplacé son chariot. Il a eu l’air étonné, le pauvre! Haha! Et j’ai calmement laissé un homme choisir son fromage même si, ce faisant, il me barrait le chemin.

Bref, le pardon – ou l’absence de jugement – est une attitude plus riche et porteuse de bonheur que la rectitude morale ou la certitude d’avoir raison. Bon, ça c’est la théorie. Il faudra maintenant que je l’applique.

L’artiste est Yuliya Nazaryan. Plusieurs de ses dessins ont un thème chrétien. Il n’y a pas de hasard…

Toutes ces réflexions sur le jugement m’ont fait voir que j’ai un poids qui me pèse sur la poitrine. Ce poids, ce sont peut-être toutes ces choses que je m’impose ou que je me refuse, sans aucune bonne raison. Des choses simples, comme m’arrêter pour photographier une scène qui m’amuse, emprunter l’ascenseur plutôt que les escaliers, prendre le temps de jaser avec une collègue sans me stresser… Tous mes jugements sur les autres et ls obligations que je m’impose sans raison me pèsent et m’enferment.

Voilà… Je n’ai pas de conclusion pour l’instant, je vous avais avertis que cette réflexion n’était pas aboutie… Je suis quand même contente d’avoir posé tout cela ici.

Ce qui m’émeut XIII et la magie des excuses

J’ai été émue aux larmes, hier, et très surprise de l’être. Je ne sais plus trop pourquoi, j’ai visionné sur YouTube un grand succès de la chanson québécoise, Je ne suis qu’une chanson, de Ginette Reno. Ginette Reno est une icone au Québec (diantre, juste l’écrire me ramène les larmes aux yeux!). Elle chante depuis les années 1960 et a plusieurs grands succès à son actif.

Dans mon esprit, c’est une artiste qui plait surtout aux mères de banlieue sans grande culture. Et pourtant, comme je l’entendais réellement hier pour la première fois, elle a une grande voix. Mais ce qui m’émouvait autant, c’est sa nationalité : Québécoise, comme moi. Moi, ordinairement si peu nationaliste, je ressentais bizarrement une grande fierté en écoutant cette grande dame de la chanson simplement parce qu’elle est originaire du même bout de planète que moi. Nous parlons le même langage, elle fait partie de ma vie parce que nous somme toutes Québécoises…

Et puis YouTube a enchaîné avec une deuxième vidéo de Ginette Reno, cette fois-ci en duo avec Céline Dion, dans une interprétation d’Un peu plus haut, un peu plus loin. Il y a tellement de choses qui m’ont émue dans cette vidéo. D’abord, la longévité de la carrière de Mme Reno, qui a plus de 60 ans dans cette seconde vidéo, contre une quarantaine d’années dans la première. Ensuite, les réactions du public, qui applaudit si fort, et qui essuie une larme. Enfin, Céline, qui rend hommage à cette grande dame par ses gestes et ses regards… C’est beau. Tout dans l’attitude de Céline dit que, si a pu aller aussi loin dans sa carrière, c’est notamment grâce au chemin tracé par ses prédécesseuses, comme Ginette Reno.

Ouf… Cela dit, je me suis un peu plus réconciliée avec mes larmes. Dans l’une des dévotions matinales de La Chapelle, un pasteur a expliqué que c’est correct de pleurer, et qu’il peut être bon de le faire, en autant que l’on sache ce que l’on arrose de la sorte et que l’on s’assure que ce soit fertile. Mon identification à la nation québécoise me semble quelque chose de fertile 😉

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Je vais en profiter pour raconter l’un de ces épisodes dont j’ai honte, mais qui sont tellement formateurs.

Cette fois, j’ai été condescendante — c’est-à-dire que j’ai eu une attitude hautaine et fait preuve d’une bienveillance teintée de mépris — envers mon amie D.N.

Une oeuvre de D., qu’elle m’a offerte il y a au moins 20 ans… Je n’apprécie pas assez mes amis-es!

J’avais acheté une paire de billets pour un spectacle de danse que nous devions aller voir ensemble, et elle m’avait dûment remboursé sa part. Lorsque la présentation a été annulée pour cause de COVID, le diffuseur nous a proposé de transformer le prix de notre billet en un don, nous avisant de la possibilité d’envoyer un reçu pour ce don à une tierce partie.

Nous étions d’accord pour faire un don et D. m’a demandé si nous pouvions recevoir un reçu chacune pour la moitié du total. « Non, que je lui ai répondu sans appel : une tierce partie, c’est quelqu’un d’autre entièrement. Couper le don en deux est impossible. » Heureusement, elle insisté et j’ai fini par avoir la bonne idée de vérifier… et découvrir que cela était possible.

J’étais contente de moi, d’avoir au moins vérifié. D. avait été un peu sèche vers la fin mais, depuis, je lui avait offert une carte et un cadeau pour sa fête et je me disais que j’aurais l’occasion de m’excuser plus tard, lorsqu’on se verrait. Mais depuis cet événement, D. n’accepte plus mes invitations, même si elle m’a chaleureusement remerciée pour la carte d’anniversaire…

Bref, je me sentais de plus en plus mal. Cette semaine, je me suis donc décidée à l’appeler pour m’excuser. J’ai laissé un message le cœur battant et, depuis, je me sens tellement mieux. Alors que j’étais stressée à chaque fois que je l’appelais, m’inquiétant de sa réaction, là, je me fiche pas mal qu’elle me rappelle ou non. Bien sûr, je vais être contente si elle retourne mon appel et que l’on se voit, mais… je ne lui en voudrait pas si elle ne le fait pas. Mon esprit est en paix. Magique.

Le chat du pasteur

J’ai une amie pasteur. Eh oui. Une femme toute menue et très souriante, que je n’ai pas vue depuis bien longtemps, mais dont je garde un excellent souvenir. Depuis notre dernière rencontre, elle a complété un cours en théologie et même trouvé une paroisse.

Comme toujours, elle écrit. En fait, maintenant, c’est son chat qui écrit hihihi Vous voyez, elle ne manque pas d’humour, même si c’est une femme d’Église 🙂 Ses posts sont souvent inspirants. Avis aux réfractaires : même s’ils parlent de Dieu, ses textes parlent finalement de la vie et de notre rapport à l’autre, de notre capacité à nous regarder, à pardonner, à créer des liens. Il y a trois de ses posts dans mes brouillons.

La prière nous invite à pardonner :

Notre Père qui es aux cieux, […]
Pardonne-nous nos offenses…
… parce que sinon, nous allons rester coincés dans une vilaine relation avec toi.
Nous préférerons avoir peur, ressasser,
Nous préférerons essayer d’être parfaits pour te faire plaisir,
Juste pour être sûrs que tu nous aimes quand même. […]
On y perdrait notre vie.
Offre-nous le pardon qui laisse le passé dans le passé,
Le pardon qui ouvre un avenir à venir… […]
Amen

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La grâce, la grâce, la grâce! parle de l’implication des citoyens dans leur communauté et leur cité :

Vous en avez marre qu’on vous dise que c’est Dieu qui sauve, qui agit, qui console, parce que vous trouvez que c’est démobilisateur, que plus personne ne voudra rien faire puisque ça ne sert à rien vu qu’il fait déjà tout et déjà tout fait?

C’est vrai, c’est agaçant (enfin, si vous connaissez suffisamment le monde des Eglises, sinon ça vous laisse probablement de marbre). […] En même temps, est-ce qu’on refuse de continuer à manger parce que ça ne sert à rien, vu que demain on aura encore faim? Non, bien sûr. Ça reste utile et même agréable de manger, même si, au fond, ça n’empêche pas la faim de revenir et en ce sens, ça ne « sert à rien ».

Au jour le jour, manger est utile et même vital, comme au jour le jour, agir dans ce monde est utile et même vital – mais nous ne sommes pas maîtres pour autant de la fin de la faim ni de l’utilité ultime de nos oeuvres.

C’est assez libérateur, parce que ça laisse la place pour se tromper… et reprendre du gâteau au chocolat.

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Enfin, Pour trois sous de Dieu, nous invite à… aller au bout de nos croyances et de nos convictions, je crois :

Dieu ? Vous m’en mettrez pour trois euros, merci.
Pas assez pour faire exploser mon esprit ni troubler mon sommeil,
mais juste assez pour remplir un verre de lait frais,
autant qu’une sieste au soleil.
Je ne veux pas trop de Dieu, il faudrait alors aimer l’homme noir
ou ramasser des choux avec un immigré.
Je veux l’extase, pas la transformation.
Je veux la chaleur du ventre maternel, pas une nouvelle naissance.
Je veux une livre de Dieu dans un sac en papier.
Dieu ? Vous m’en mettrez pour trois euros, merci.

Quand je vous dis qu’elle est inspirante, même si elle parle de Dieu 😉 Bises, Pascale!

Aïe, ma mère a raison! ;)

J’ai lu plusieurs pages de The noble eight path, de Bhikkhu Bodhi quand je suis allée bénévoler au centre de méditation cet été. Un passage sur le karma m’a inspiré :

« The literal name [of karma] is ‘right view of the ownership of action’ and finds its standard formulation in the statement: « Beings are the owners of their own actions, the heirs of their actions. Whatever deeds they do, good or bad, of those they shall be heirs [Le nom littéral du karma est ‘vue juste de la propriété des actions’ et trouve sa formulation standard dans la phrase : ‘Les êtres sont les propriétaires de leurs propres actions, les héritiers de leurs actions. Qu’importe les actions qu’ils posent, bonnes ou mauvaises, ils seront les héritiers de celles-ci.] En somme, le « karma » n’est rien d’autre que notre vie présente, telle qu’elle a été bâtie par nos actions passées. C’est beau, hein?

Bon, ma mère, qui est croyante mais qui ne médite pas formellement, ne dit rien d’autre quand elle me refile un polycopié un peu kitch qui résume une conversation qu’un théologien brésilien aurait eu avec le Dalaï Lama. C’est kitch, mais voici la conclusion qu’elle a annoté pour moi d’un « Ma plus grande croyance! » plein d’entrain et de gentillesse.

« Prends soin de tes pensées parce qu’elle deviendront des mots
Prends soin de tes mots parce qu’ils deviendront des actions
Prends soin de tes actions parce qu’elles deviendront des habitudes
Prends soin de tes habitudes parce qu’elles deviendront ton caractère
Prends soin de ton caractère car il deviendra ton destin. »

« L’univers est l’écho de nos actions et de nos pensées. » C’est le karma, quoi. 🙂

ps – ça me touche d’écrire tout cela… Ça traîne sur ma table de travail depuis des semaines, je crois que ce n’est pas un hasard. xxx

Deux jours, une question #12

La belle mort pour vous?

C’est la dernière question du questionnaire de Socrate.

Ma réponse? Une mort sans regret et sans ressentiment, où j’aurai l’impression d’avoir, de mon vivant, dit tout ce que j’avais à dire et réglé tout ce que je voulais régler (ou décidé qu’il était impossible de régler une question donnée et que c’était très bien comme cela.).

Ma mère se rapproche un peu de cet idéal en vieillissant. Quand je lui parle de ce qui l’a blessée dans le passé, elle dit que cela est derrière elle, maintenant, et elle semble réellement sincère et sereine. Elle a réellement pardonné et ne nourrit pas de ressentiment… même si elle peut trouver certaines personnes ou situations très critiquables 😉

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Pas fâchée que ce questionnaire-défi soit terminé! Je vais pouvoir revenir à des billets plus personnels… J’ai plein de choses à dire, j’ai hâte de me vider le cœur! 😉

La honte II

Ma réflexion sur la honte continue. Aujourd’hui, me concentrer sur ce qui était présent (elle) m’a aidée à me sentir plus à l’aise et à aller vers les autres.

Ma honte est multiforme. En tant qu’enfant, j’avais honte de ne pas avoir de papa. Et d’être incapable de faire quoi que ce soit (la preuve étant que ma mère faisait tout pour moi). Sentiment d’impuissance et de honte assuré.

Je me reconnais tellement dans ce livre de Jean Monbourquette. J’en veux encore à cette charmante femme qui m’a élevée,  même si j’aimerais bien que ce ne soit pas le cas. J’ai du mal à lui pardonner… J’ai du mal à reconnaître l’offense (la première étape d’un pardon).

Bref, la réflexion continue.

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Trache de vie. Je planifie prendre l’autobus qui passe juste en-dessous de chez-moi. Pour m’assurer de l’attraper, je décide de partir avec un peu d’avance. Sage décision: le bus est passé avec quatre minutes d’avance et j’ai dû presser le pas pour l’attraper. Or, plutôt que de me féliciter de ma décision et de ressentir de la fierté, mon premier réflexe est de maugréer contre les chauffeurs d’autobus qui ne respectent pas leur horaire! Avant de me rattraper avec un sourire 🙂