James Pennebaker : mon travail II

Je me rappelle quand je suis arrivée à mon emploi actuel. Tout le côté corporatif de l’organisme — le logo, la culture d’entreprise, la politique de ressources humaines — me puait au nez. Comme l’a si bien résumé J., j’avais une attitude de marde. Me faire dire que je travaillais dans le meilleur organisme, le plus grand, le plus vertueux me semblait du marketing cheap, rien d’autre. La mission même de l’organisme me semblait très, très ordinaire. D’autres organismes avaient une mission similaire et je ne les respectais pas plus. Surtout, je ne voyais pas pourquoi nous étions censés être les meilleurs. Je le vois un peu mieux maintenant — et ce n’est pas que du marketing et notre mission, eh bien… n’est pas si inutile.

Même ma tâche principale me fâchait. J’avais l’impression que je devais respecter les façons de faire de mon prédécesseur et ancien patron. Je me sentais seule dans la défense de sa mémoire et de ses façons de faire, presque menacée.

Je me rappelle aussi à quel point je détestais les réunions. Je les trouvais ennuyantes au possible, inutiles, sans intérêt. Ma supérieure de l’époque, D., m’en avait d’ailleurs glissé un mot, en me demandant de changer d’attitude. J’ai eu la chance, avec cet emploi, de tomber sur des gens biens, qui tendent à nommer les choses.

Après environ deux ans, j’ai décidé que je voulais partir. Par contre, j’ai eu la bonne idée de me demander pourquoi, pour éviter de reproduire exactement les mêmes malaises dans un autre organisme ou entreprise. J’ai réalisé que je ne voulais pas vraiment partir, mais plutôt travailler davantage avec les autres et partager un bureau avec quelqu’un plutôt qu’en avoir toute seule. Ce n’est pas partout où l’on peut vivre de sa plume en écrivant des textes qui ne sont pas complètement idiots, comme de la pub. Réaliser cela m’a beaucoup aidée. Ça été un premier pas dans la bonne direction.

Je me rappelle les premières semaines à mon nouvel emploi, voire les premiers mois, où les gens venaient vers moi. M.-A., en particulier, qui venait me sourire avec sa tasse de café. Je n’ai pas su apprécier cela, en voir la valeur. Je crois que mes goûts et dégoûts ont été trop apparents et ma carapace, trop mince. Je me rappelle du regard surpris de M.-A. quand je m’étais assise à côté d’elle et son équipe, un midi, comme si je faisais partie de sa gang. J’ai interprété sa surprise comme un rejet, mais c’était peut-être simplement de la surprise.

À vouloir parler avec tout le monde, je me retrouve souvent à parler avec personne 😦

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